vendredi 9 septembre 2011

Crise de gouvernance à l'AFP

Le personnel de l'Agence France-Presse a adopté jeudi 8 septembre une motion de défiance contre le PDG Emmanuel Hoog. Il lui reproche de vouloir renforcer le rôle de l'État au sein du conseil d'administration de l'agence et de mettre ainsi en péril l'indépendance des journalistes.

Emmanuel Hoog
(© Laurence Vasconi/INA)
La motion de défiance, soumise en début de semaine au vote du personnel de l'Agence France-Presse et visant le PDG Emmanuel Hoog, a été largement adoptée jeudi 8 septembre. 88,33 % des suffrages se sont exprimés en faveur du texte. Un vote massif qui traduit le malaise auquel l’agence de presse est confrontée depuis plusieurs mois.

Retour sur les faits. En avril 2010, Emmanuel Hoog, jusqu’alors PDG de l'Institut national de l'audiovisuel (INA), est nommé à la tête de l’AFP. Présenté comme le "candidat du pouvoir", cet énarque se voit confier une mission de taille : réformer le statut de l’agence de presse qui date de 1957, en clarifiant notamment les relations entretenues avec l’État. Une entreprise d'autant plus périlleuse que ce statut est considéré par le personnel comme un bouclier protégeant l'indépendance des journalistes.

Plainte contre l'Agence en 2010

Un an après la nomination de M. Hoog, le sénateur UMP Jacques Legendre dépose une proposition de loi ayant pour but de "garantir un développement ambitieux et responsable de l'Agence". Régulièrement sous le feu des critiques de politiques de tous bords qui mettent en doute sa neutralité, cette dernière a fait l'objet d'une plainte déposée en 2010 à la Commission européenne par l'agence de presse allemande Deutsche Depeschendienst (ddp). L'institution européenne reproche à l'agence de presse française de bénéficier de subventions illégales en regard du droit européen. Un argument sur lequel M. Hoog s'appuie pour justifier l'urgence d'une réforme de l'AFP et la nécessité, notamment, de modifier sa gouvernance.

Dès sa publication, le texte du sénateur Legendre suscite la colère des syndicats de l'agence (CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, SAJ-UNSA et SUD) et d'une grande partie des salariés qui se mettent en grève à deux reprises aux mois de mai et de juin derniers.

Colère du personnel de l'Agence

L’été a été mouvementé au siège de l'agence, place de la Bourse. Le Syndicat Autonome des journalistes (SAJ-UNSA) a rendu publics des documents attestant que le PDG de l’AFP s’était rapproché du cabinet de conseil en communication Media9, dirigé par Pierre-Jérôme Henin, un ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy, pour faciliter l’adoption de la réforme. L’affaire, révélée par le Canard enchainé le 17 août, a ravivé la colère du personnel de l’agence qui demande aujourd'hui "au PDG d'en finir avec ses manœuvres indignes dirigées contre l'Agence et ses salariés et de renoncer à promouvoir ce projet de changement de statut".

À l'issue de l'assemblée générale qui se tenait jeudi 8 septembre dans les locaux de l'agence à Paris, un représentant syndical a remis en mains propres le texte à Emmanuel Hoog. Prenant "acte des résultats", ce dernier a également déploré que des boîtes mails aient été "piratées", des disques durs "visités" et des mots de passe "craqués", dénonçant des "pratiques illégales indignes de l'AFP".

À la suite de cette réaction, l'intersyndicale a convenu de se réunir vendredi 9 septembre pour débattre de la marche à suivre. "Les représentants syndicaux se dirigent vers un appel à un arrêt de travail de 24h reconductible dès lundi, a confié un membre du SAJ-UNSA, rappelant que la dernière motion de défiance adoptée par le personnel de l’AFP avait entrainé la démission en 2000 du PDG de l’époque Éric Giuily. "Le communiqué d’Emmanuel Hoog prouve clairement que, dans cette histoire, seul l’Élysée décide."

Aller plus loin :
La proposition de loi du sénateur Legendre
Le site SOS-AFP

E.S.

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