mardi 6 septembre 2011

Affaire DSK : la grogne des féministes

Au lendemain du retour de DSK en France, des militantes féministes se réunissaient lundi 5 septembre pour organiser la riposte.

"L’abandon des charges contre DSK est un grand pas en arrière pour la parole des femmes ." Depuis la décision du procureur Vance, Nelly Martin, coordinatrice France de la Marche Mondiale des Femmes (MMF) ne décolère pas. Lundi 5 septembre, elles étaient une centaine de militantes féministes à avoir répondu à l’appel de la MMF. Réunies dans une salle de la bourse du travail de Paris, les copines sont venues pour exprimer "leur rage", leur sentiment de révolte et d’injustice et réfléchir ensemble à une réplique. Le Collectif national pour le droit des femmes, Osez le féminisme, Femmes solidaires, la Barbe, Ruptures etc. La plupart des associations féministes étaient représentées. A leurs côtés, des femmes qui venaient pour la première fois exprimer leur mécontentement.

"Une fois de plus justice n’a pas été faite"
L’affaire DSK a dans un premier temps libéré la parole des femmes. "Notre standard téléphonique a explosé en mai/juin", explique Marie-Ange Salou, président de l’ADVAS, association d’aide aux victimes. "L’affaire DSK a eu un impact extrêmement violent sur mes patientes, raconte la psychiatre Muriel Salmona, présidente de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie. Celles qui avaient osé porter plainte contre leur agresseur avant l'été, le regrettent aujourd'hui. L'affaire DSK a valeur de modèle et une fois de plus justice n’a pas été faite." D’une seule voix, elles dénoncent une "justice patriarcale", l’attitude de la police qui n’hésite pas à demander à une victime de viol "comment était l’érection de son agresseur et si elle a mouillé" et les procédures administratives à rallonge, humiliantes qui découragent les victimes. "Seulement 10% des femmes violées portent plainte et 1 à 2% des procédures aboutissent à une condamnation", rappelle Clara de la MMF.

"Les valeurs de gauche ne sont plus là"
"On parle beaucoup trop de son retour, enchaine Louisa, étudiante à Sciences-Po et militante féministe. Et le soutien de la classe politique est scandaleux ! Le rapport médical est pourtant clair et le procureur a bien dit qu’il y avait eu un rapport 'vraisemblablement non consenti'". Les copines demandent des comptes. Traditionnellement soutenu par la gauche, le mouvement féministe se sent abandonné. "Martine Aubry n’est pas claire sur le cas DSK. On nous mène en bateau !" lance Françoise, une militante de la MMF. Même procès pour François Hollande et Ségolène Royal. Les militantes sont abattues par les récentes déclarations des candidats à la primaire qui laissent une porte entrouverte à DSK pour un éventuel retour en politique et louent son expertise. "Il faut les obliger à se positionner contre les violences faites aux femmes", propose une militante. Certaines envisagent même de rendre leur carte au PS. "Je suis déçue. Les valeurs de gauche ne sont plus là", commente Marion, 24 ans, militante à Osez le féminisme.

Un nouveau souffle pour le mouvement féministe
"Quels risques sommes nous prêtes à prendre ? sonde Natacha. Dans les années 70, des femmes ont risqué la prison pour défendre leurs droits. Nous devons prendre des mesures fortes. Les féministes gentilles, qui font du théâtre, ça suffit pas !" Dans la salle les propositions fusent : occuper les médias, camper sur la place des Vosges, lancer une opération commando pour empêcher DSK de parler au journal télévisé de 20h. Quelques voix s’élèvent pour appeler à une union solidaire des associations féministes. Monique Dental, animatrice du réseau Ruptures prend la parole : "Pour le combat de l’IVG nous avions des positions et des modes de fonctionnement très différents, mais nous avons su faire corps. Aujourd’hui la question du viol nous rassemble. Créons dès ce soir un mouvement général." Ce soir, les militantes sont reparties gonflées à bloc, bien décidées à frapper un grand coup et à faire parler d'elles. Prochaine étape : un rassemblement est organisé place des Vosges, dimanche 11 septembre, à partir de 14H.

Voir l'interview de Marion, membre de l'association Osez le féminisme :




Aller plus loin
- Le blog du Dr Muriel Salmona sur Mediapart
- Un Troussage de domestique, ouvrage collectif sous la coordination de Christine Delphy, éditions Syllepse

Légende : Membre du collectif "La barbe" lors de la journée internationale des femmes, le 8 mars
Crédit photo : ©looking4poetry

Julia Zimmerlich

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